Ce soir je suis allé dans un salon funéraire (ça commence bien direz-vous
). Le corps du mari d'une grand-tante y était exposé, un homme que je n'avais jamais vu de ma vie, dont j'ignorais jusqu'au nom et l'histoire. J'ai tout de même tenu à y aller, par respect envers cette parenté qui me tient à coeur (j'attache beaucoup d'importance à la famille, aux traditions et à la hiérarchie).
La deuxième personne à qui il "fallait" serrer la main était cette même grand-tante, que je connaissais déjà mieux. Quand j'étais plus jeune (peut-être dix ans en arrière), ma mère nous emmenait souvent chez elle, puisqu'elle vivait seule et nous aussi (son mari étant en foyer de retraité à cause du Alzheimer et mes parents étant divorcés). Ainsi, ma mère et elle, et par extension ma soeur et moi aussi, avons tissé des liens assez importants.
Alors ce soir, lorsque je lui ai serré la main pour lui offrir mes sympathies, bien qu'on ne se soit pas vus depuis des lustres, elle était très touchée par ma présence. Elle m'a serré dans ses bras, me demandant si je me souvenais d'elle et des moments passés ensemble. C'était, pour moi mais surtout pour elle, un instant d'une grande joie, dans un endroit aussi inattendu qu'un salon funéraire, alors que son mari est mort il y a quelques jours à peine.
Ces quelques minutes (j'y suis resté maximum 15 minutes) m'ont fait réaliser quelque chose. Bien qu'on souligne la mort d'un proche, tous ces gens réunis, qui s'apprécient, se connaissent bien, affichaient la plupart du temps un sourire radieux. Les poignées de mains vigoureuses, les paroles échangées avec entrain emplissaient cette salle où l'on aurait pu s'attendre à des larmes et des visages tristes. Même dans un contexte tragique, tous ces gens étaient heureux de se retrouver ensemble et de partager quelques instants.
Quant à moi, qui ne connaissais pas le quart des personnes réunies, je me faisais escorter par ma mère qui s'occupait de me présenter à ces oncles et tantes que je connaissais à peine. De me revoir après tant de temps*, plusieurs étaient très contents. Le classique "comme tu as grandi!" était sur toutes les bouches et nous étions tous heureux de refaire connaissance, nous qui étions presque devenus des inconnus. Des oncles sympathiques, des tantes charmantes, tous se souvenant de mon enfance alors que, pour ma part, je n'en reconnaissais presque aucun.
Ainsi, il semble que la mort de ce vieil homme, qui laisse une marque sombre à cette partie de nos vies, ait pourtant réussie à provoquer la joie chez les gens. N'est-ce pas étrange et fantastique?
*Ma mère ayant renié ses parents il y a six ans, j'ai été privé de contact avec la moitié de ma famille pendant longtemps. À ce jour, je reprends progressivement contact avec mes deux oncles (le jdr va peut-être même nous aider à le faire!), et peut-être plus tard avec mes grands-parents. Je me sentais comme un intrus en sortant, lançant un "salut!" hésitant à mon grand-père qui parlait à ma soeur sur le pas de la porte. Le plus étrange étant qu'il me l'a renvoyé avec la même chaleur, comme si nous n'avions jamais cessé de nous côtoyer. Vraiment, sans la moindre hésitation, sans reproche et tout naturellement. En tout cas, merci à ma soeur aînée d'ouvrir la voie vers la réconciliation!
Et
merci à vous de lire cette tranche de vie que je n'aurais autrement partagée avec personne